Orateurs et tribuns 1789-1794

280 ORATEURS ET TRIBUNS.

Corneille, mais qui ponctuait si bien (ous ses mots, dont le regard, au défaut de la parole, était toujours éloquent.

Pour colorer la sentence de Séchelles, Robespierre et ses affidés durent faire [un faux. Quelque temps auparavant, il rencontra dans la charrette Hébert, Clootz, Ronsin : « C’est par hasard que je me suis trouvé sur leur passage, dit-il; je ne courais pas après ce spectacle, mais je ne suis pas fâché de l'avoir rencontré; cela rafraichit. » I se défendit fièrement devant ses juges, et alla à l’échafaud comme s'il revenait d’un banquet, la tête haute, l'air souriant, promenant ses regards autour de lui sans chercher à fixer l'attention, à inspirer l'intérêt. Peut-être, à l'heure suprême, cherchait-il à résumer dans sa mémoire ses meilleures journées de voluptueux bonheur, comme dans un vase myrrhin l’esclave répand les essences les plus rares pour son maître, comme l'amant compose des plus belles fleurs un bouquet pour la femme aimée. Peut-être songeait-il aux vers d’Adrien sur son âme prèle à prendre congé du corps, animula vagula, blandula, à ces Romains du temps des Césars qui, par ennui, par ordre du prince, se faisaient ouvrir les veines, mort plus gracieuse sans doute que celle où le poussaient l’injustice de ses ennemis, la justice de la Providence.