Orateurs et tribuns 1789-1794
L'ESPRIT DES ORATEURS DE LA CONSTITUANTE. 33
qui retentit dans toute la salle. Ce f... allait être suivi, comme il me l’a dit depuis, d’un torrent d’imprécations. On ne lui en donne pas le temps; toute l’Assemblée est aussitôt en tumulte, une multitude de voix demandent vengeance de l’insulte. Virieu se contente de descendre de la tribune ; tout est oublié. »
Je croyais en relisant cette scène, repasser celle où Virgile raconte les mœurs, les rumeurs des abeilles, apaisées par un peu de poussière jetée sur les combattantes. Dans la ruche de la Constituante, les frelons paresseux et violents dévorèrent trop souvent le miel
« Les applaudissements, disait Fauchet, sont la liste civile du peuple. recueillir les éloges des bons citoyens et les éloges des mauvais, pour une Assemblée nationale, c'est avoir réuni tous les suffrages. » Mais de quel côté sont les bons citoyens? De quel côté sont les mauvais?
« Nous n'avions jamais prétendu rendre compte de lépouvantable bavardage de la tribune, écrit Dumont qui, avec Duroverai, rédigeait pour le Courrier de Provence la chronique parlementaire dela Constituante. S'il y avait quelques discours importants, comme ils étaient presque tous écrits, Mirabeau avait soin de les demander pour nous. Plusieurs les envoyaient d'eux-mêmes. Les plus diffus se plaignaient quelquefois de ce qu’on avait réduit leur style hydropique et boursouflé. Peu étaient contents, mais cependant Mirabeau recevait des remerciements qui ne manquaient pas de nous revenir. « On doit croire dans les provinces, lui disait Cha» pelier, que nous parlons comme des oracles, quand onnous voit » dépouillés de tout notre verbiage et de toutes nos sottises. »
» L'hypocrisie et la fureur occupent alternativement la scène. Chaque séance est un mensonge de plusieurs heures à l'aide duquel on déguise ses propres intentions. La crainte d’être soup-