Précis de l'histoire de la révolution française. T. 1-3

k NATIONALE. 565

prime le même sentiment, afin de n'être pas frustrée de sa récompense. Elle est condamnée. — On accourut pour voir passer cette victime de l’amour conjugal. Les cheveux blancs de son mari honoraient encore davantage son dévouement. Quelque temps après, une sœur imita cet exemple pour suivre son frère; une jeune fille l’imita encore pour être rejointe à celui qu’elle aimait. Ce füt le libraire Gattey qui reçut ce témoignage douloureux de tendresse fraternelle. À Lyon, il y eut aussi plusieurs traits héroïques de ce genre.

Plusieurs domestiques des deux sexes avaient obtenu de suivre leurs maîtres dans la prison, et ils les suivirent à léchafaud.

Les filles séparées de leurs parens étaient aux genoux des membres des comités révolutionnaires , jusqu’à ce que la même prison les eût recues. Il arrivait quelquefois que, pendant les interrogatoires , des commissaires, émus d’une pitié involontaire pour leur jeune âge , ou séduits par leur beauté , leur ménageaient des moyens de séparer leur cause de celle de leurs parens : alors il s'élevait une lutte cruelle et généreuse dans la triste famille. Un père, une mère éplorés, saisissaient avidement les moyens qu'avait fournis la. pitié des commissaires : à ce prix, ils eussent aggravé les accusations qui leur étaient personnelles. Soins inutiles ! la piété filiale voulait que tout fût confondu. Mme de BoisBérenger, Mme de Malezi, sa sœur, périrent ainsi avec les auteurs de leurs jours, malgré ceux-ci, et presque malgré leurs juges.

Un père était enfermé avec son fils à Saint-Lazare {Loizerolle est leur nom). Le fils fat compris dans une conspiration de prison. On vint pour le transférer à la Conciergerie avec une foule de ses compagnons ; il était alors absent de la salle commune des détenus. Le père entend appeler son fils. La désignation de celui-ci était positive. Loëzerolle P Le voici, dit le père, en s’avançant. Les juges faisaient si peu de questions aux accusés, qu’il put consommer Île sacrifice de sa vie et sauver celle de son fils.

Je lis dans les mémoires du temps qu'un frère périt volontairement à la place de son frère. Je regrette qu’on n'ait pas fait connaître son nom.

Dans les jours même où le tribunal révolutionnaire osait prononcer labsolution de quelques accusés, il n’arriva à nul d’eux de, compromettre un tiers pour se justifier. Un jeune homme possédait des pièces quirejetaient sur un de ses amis toute l’accusation dirigée contre lui. Il les brûla , dans la crainte d’être tenté d’en faire usage.