Précis de l'histoire de la révolution française. T. 1-3

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ce qui rendait le maréchal Suwarow l’espoir et le chef de la coalition. L’étendue dé son génie militaire a toujours été mise én problème chez les hommes versés dans cette science. Le succès de ses plans n’a pu dérober à leurs yeux des fautes importantes. Mais on convient que les lieux, le tumulte des ba tailles, et sur-tout la connaissance profonde du caractère de ses soldats , lui fournissaient d'étonnantes inspirations,

Le maréchal Suwarow pressa vivement les Français dans leur retraite. Il s’empara de Bergame et de Brescia ; il investit Mantoue, Peschiera ; Pizzighitone ; il s’avanca sur la république cisalpine par les deux bords du lac de Garde. Il détacha une partié de ses forces pour soutenir une insurrection que le peuple de Ferrare avait entreprise contre les Français. Il prit toutes ses mesures pour que le même mouvement se répandiît dans toutes les parties de la péninsule, Tout respirait dans ses proclamations un zèle religieux , et tel, que le scrupuleux Italien oubliait en lui l’hérélique , et ne voyait que le héros chrétien. Les Toscans prirent les armés , et se montrèrent acharnés contre leurs nouveaux maîtres. La révolte s'étendait dans l’état de l'Eglise. La nouvelle république fondée à Naples était livrée aux plus terribles orages. Roger de Damas avait pénétré dans la Calabre avec quelques soldats ; il y avait organisé un mouvement assez semblable à celui de la Vendée. Il était secondé par un personnage important que tout rendait redoutable dans cette sorte de guerre ; c'était le cardinal Ruffo , homme adroit, violent , qui, accablé d'infirmités , bravait toutes les fatigues ; qui, dévoué aux intrigues des cours et très-accessible à leurs voluptés, affectait un zèle ardent , austère et superstitieux ; qui , portant le glaive d’une main et le crucifix de l’autre , exerçait la double autorité d’un chef valeureux et d’un prince de l'Eglise.

Les deux républiques cisalpine et ligurienne montraient seules de la fidélité aux Français; la première n'avait pu toui-à-fait pardonner les conps d’état capricieux par lesquels le directoire avait troublé son organisation encore récente. Elle avait envoyé sous les drapeaux de l’armée d’Italie des lésions qui avaient fait estimer leur courage et leur discipline. Quand on apprit à Milan les combats désavantageux de Schérér et la retraite qui en était la suite, il y eut un mouvement général pour marcher vers les frontières menacées ; mais le directoire français avait ordonné le désarmement des citoyens cisalpins. Au lieu de l'exaltation qui brave les dangers , ils n’eurent plus qu’un impatient désir de S'y soustraire. Les membres du gouvernement disposaient tout pour leur départ. Où s’accablait de reproches; on ne prenait aucune Mesure. Le général Schérer , instruit de ce désordre ; Se trou-