Relation des faits accomplis par les révolutionnaires genevois de 1794 à 1796 : extraite d'ouvrages contemporains, et suivie de documents inédits
l'esprit militaire. Grâce aux tendances socialistes, la démocratie s’attaque aujourd’hui plus encore aux fortunes qu'aux individus ; elle ne veut plus détruire, elle veut jouir ; elle est devenue moins cruelle, mais plus cupide; elle a plus d'envie que de colère; elle ne demande pas du sang, mais de l’or ; elle aspire à son tour aux plaisirs sensuels plutôt qu’à la volupté toute métaphysique des vengeances. Sans doute, il existe parmi nous quelques hommes violents et cruels qui ne demanderaient pas mieux que de renouveller les scènes du Bastion, et qui se plongeraient avec ivresse dans les saturnales d’une seconde Terreur ; mais ces choses leur sont désormais impossibles, ou du moins elles ne dureraient qu’un jour et provoqueraient une répression terrible. Une position toute nouvelle est faite à Genève. En abdiquant une partie de sa souveraineté, en devenant Suisse, Genève a gagné de la sécurité ; elle s’est assuré une protection, peut-être encore plus eflicace contre les brutalités de ses hommes dangereux, que contre les périls extérieurs. Un bataillon suisse peut la sauver de l'anarchie, mais une armée suisse ne viendrait peut-être pas la défendre contre l'invasion. C’est à ce titre surtout que nous devons nous applaudir d'être devenus membres de la confédération. Jadis, n'ayant à lutter que contre l'autorité morale des magistrats, la brutalité démagogique était chez nous bien plus à l'aise; désormais, elle se heurterait aux
bayonnettes fédérales.