Souvenirs des campagnes du lieutenent-colonel Louis Bégos, ancien capitaine-adjudant-major au deuzième régiment suisse au service de France

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fis battre la charge et attaquer les Russes à la baïonnette.

Cette seconde attaque fit rebrousser les Russes de plusieurs centaines de pas. Nous les forçàmes d'abandonner la forêt et de repasser la grande route; mais, comme ils étaient beaucoup plus nombreux que nous, ils recommencçaient la fusillade. Nous échangions bien quelques coups de feu, mais, au bout de vingt minutes, ils reprenaient leurs premiers avantages, et cherchaient à nous jeter dans la Bérésina. Alors je faisais de nouveau battre la charge, et nos baïonnettes les repoussaient bien en arrière. Sept fois de suite nous les attaquâmes avec la même vigueur, et sept fois nous couvrimes le terrain de leurs morts et de leurs blessés. Malgré ces avantages partiels, j'étais vivement inquiet sur le sort de notre drapeau : à deux reprises, les officiers qui le portaient avaient été mis hors de combat; je le remis alors à un officier, pour qu’il fût à l'abri au quartier général.

Bien que nos hommes fussent exténués de fatigue, qu’ils n’eussent rien mangé de toute la journée, pas un d’eux ne proférait une plainte,