Souvenirs des campagnes du lieutenent-colonel Louis Bégos, ancien capitaine-adjudant-major au deuzième régiment suisse au service de France

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le service de la grande armée. L'un de mes voltigeurs alla chercher des vivres, et l’autre se rendit à l'hôpital, afin de s'informer si, comme je le soupconnais, mon frère n’y était point arrivé. En effet, il y était fort malade, ce pauvre frère, et dans la plus grande misère. Je lui fis remetire quelques vivres, un peu d'argent et l’une des deux chemises que je possédais, car, à peu de chose près, j'étais aussi misérable que lui : mes pieds et mes mains gelés, ainsi que ma profonde blessure, me faisaient cruellement souffrir.

Je voulais repartir au plus vite, mais il n’y avait aucune voiture disponible. Toutes avaient été arrêtées pour le transport des munitions de l’armée. Miné par la fièvre, sans argent, je me trouvais encore à quelques cents lieues de mon pays.

Nécessité fait Joi et j’attendis trois jours. Pendant ce temps, je vendis tous mes petits bijoux en or, je n’en obtins que moitié prix, mais, pour partir, il me fallait de Pargent, et la nouvelle venait de se répandre en ville que les Russes allaient arriver. Je fis alors demander un char de malades à l'hôpital, mais il me fut encore répondu qu'il n'y en avait pas, parce que tous les maJades venaient de partir, et qu’ils s'étaient mis en