Souvenirs des campagnes du lieutenent-colonel Louis Bégos, ancien capitaine-adjudant-major au deuzième régiment suisse au service de France

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lors, mais je crois encore entendre ce bruit strident qui se communiquait à tous mes nerfs, car alors le chloroforme n’était pas inventé !

Ma main droite fut encore examinée ; elle était un peu racornie par le froid; tous les ongles en étaient tombés; elle me faisait assez souffrir. Le chirurgien trouva inutile d’y rien couper. Je lui en sus bon gré, car depuis lors, quoique très déformée , elle n’a pas moins fait son service aussi utilement que l’autre.

Voilà où j'en étais de mes misères, lorsque le quartier-maître de notre régiment vint me voir et me donna une partie de ma paie arriérée. J’y fus très sensible, car j’en avais besoin. Muni d’une somrae passablement ronde, mes camarades d’hôpital me firent remarquer que je serais infailliblement volé par les infirmiers, qui ressemblaient assez à des Cosaques pour le pillage. Décidé à ne pas être leur victime, je priai instamment le chirurgien en chef de me garder mon argent jusqu’au moment où je pourrais repartir. Get excellent homme voulait me donner un reçu; je le refusai très positivement, en lui déclarant que, si je venais à succomber, il voulüt bien remettre cet argent à mes camarades de passage, malheureux