Théveneau de Morande : étude sur le XVIIIe siècle

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façon si dure sur le pauvre Audinot. Ce qui irrita le directeur dépouillé, plus encore que les manœuvres de ses concurrents ‘, ce fut l’attitude de Nicolet qu’il accuse « de lui avoir lâchement porté les derniers coups... J'ai souffert avec courage, écrit Audinot, les atteintes des sieur Gaillard et Dorfeuille, même celle de Parisau. J’ai eu, à leur égard, la fermeté du lion mourant; mais, comme lui aussi, j'éprouve tout à coup le même découragement et j'avouerai, que je n'ai pas assez de force pour résister au coup de pied de Nicolet ». Ce beau désespoir ne dura pas, et Audinot, dès le mois d’octobre 1785, racheta le bail des concurrents qui l'avaient supplanté.

Morande n'aimait pas Audinot. Il affirme

1. On a conservé le mémoire en réponse des sieurs Gaillard et Dorfeuille. Ils établissent qu'Audinot ne tenait son spectacle que d’une permission annale du lieutenant-général de police, et que l'Opéra avait le droit de mettre aux enchères l’entreprise des théâtres forains ; que, du reste, Audinot aurait pu, s’il l’eût voulu, conserver son théâtre, à l'exemple de Nicolet qui avait fait une soumission de 24,000 livres afin de garder la direction de sa troupe. Mais Audinot s'était borné à offrir à l'Opéra de lui verser chaque année le dixième de sa recette nette. Pierre-Germain Parisau, ancien associé d’Audinot, passé, il est vrai, dans le camp ennemi, confirme sur tous ces points les assertions de Gaillard et Dorfeuille (v. le Mémoire pour Parisau du 30 mars 1785).