Théveneau de Morande : étude sur le XVIIIe siècle

MORANDE ET BEAUMARCHAIS. 239

sévères qu’on prête au marquis de Saint-Hurugue, elles sont invraisemblables, puisque le marquis n'a jamais eu 500 guinées dans sa bourse. Morande dissimule son dépit sous une gravité d'emprunt et fait la lecon sans rire au pauvre Kornmann : « Il seroit ridicule de s’inscrire en faux contre une absurdité, mais il est à propos d'observer que c’est un malheur pour M. Kornmann, qui est sûrement étranger à tous les écrits clandestins publiés en sa faveur, depuis son premier mémoire, que des avocats anonymes adoptent des moyens aussi peu dignes de lui pour le défendre. »

Il y avait cependant une part de vérité dans les allégations ironiques de la lettre apocryphe de Morande à Beaumarchais. Le malheureux libelliste trouvait plus difficilement à gagner sa vie en Angleterre: et, après tout, puisqu'il était obligé de vivre à peu près honnétement, mieux valait revenir sur la terre de France, où les évènements pouvaient fournir à un homme de ressource comme lui bien des occasions de percer. Morande quitta brusquement le Courrier de l'Europe, le 14 mai 1791, et se rendit à Paris *. Quelques jours

1. C’est dans la Réplique à Brissot que Morande donne la date du jour où il se sépara de ses collaborateurs du Courrier de l'Europe. Rien dans les numé-