Trois amies de Chateaubriand

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30 TROIS AMIES DE CHATEAUBRIAND

jeune femme, preste et menue, habillée d’une robe rose un peu lie de vin, tend de la main gauche une couronne de roses roses. Elle la tend avec une si calme grâce que, pour M. Bardoux, c’est à son père qu’elle la destine. Le tableau, du reste, a le plus vif agrément; il laisse deviner une âme remuante, inquiète, primesautière, apte pourtant au silence. :

Mais Mme Vigée-Lebrun, qui dans ses mémoires raconte tant de choses, souvent insignifiantes, et qui enregistre ce portrait à la date de 1788, ne dit pas un mot de Pauliñe de Beaumont. Elle ne l'avait donc pas remarquée, tandis qu’elle la peignait avec intelligence et goût? Ce n’est point un bon signe, pour cette femme de talent; et nous lui en voulons. Préférons-lui la fine Mme Suard qui, elle, nota : « Nous avions vu Mme Beaumont, la cousine et l'amie de M. de Pange, chez Mrne de Staël; elle nous montra le désir d'accompagner son parent dans nos soirées : elle s’y plut beaucoup, et nous la trouvâmes aussi spirituelle qu’aimablet, » Il y avait assurément mieux à dire. Maïs enfin, ce petit bout de phrase est une épave de souvenir qui nous arrive, tel quel, des lointaines années de Pauline de Beaumont. Il suffit à montrer qu’une âme de choix ne passa point tout à fait inaperçue; il nous épargne lamer sentiment de la méconnaissance et de la solitude où les êtres vivent les uns à côté des autres.

4. Mme Suanp, Essais de mémoires sur Suard (Paris, 1820), p. 170. ny ‘