Trois amies de Chateaubriand

4 TROIS AMIES DE CHATEAUBRIAND

avait une jolie élégance. Elle avait retrouvé, pour sa poésie, la Grèce antique; et elle réalisait ce paradoxe de l’art le plus fin, le plus savant et subtil, à cette époque où la barbarie se démenait déjà : ainsi naîtrait et fleurirait sous l'orage une rose délicate qui ne résistera point à la tourmente.

Un autre caractère, et pathétique, de cette société d’ancien régime défaillant, c’est l'imprudente faveur qu’elle accordait aux idées nouvelles, — oui, à ces nouvelles idées, séduisantes peut-être, mais meurtrières et dont elle devait mourir.

En 1787, le chevalier de Pange était « démocrate», Bientôt, avec la jeunesse d’alors, 1l compta sur les États généraux pour tout arranger. Les doctrines de Condorcet l’enchantaient et il faisait figure parmi les «amis de l'humanité ». Ensuite, il connut son erreur: les événements lui ouvrirent les yeux et il vit le peuple assez pour vérifier que les foules sont stupides ou sauvages.

Le 28 août 1790, dans le Journal de la Société de 1789, André Chénier publia un « Avis aux Français sur leurs véritables ennemis ». Il y disait : « Lorsqu'une grande nation, après avoir vieilli dans l’erreur et dans l’insouciance, lasse enfin de malheurs et d’oppression,: se réveille de cette longue léthargie et, par une insurrection juste ei légitime, rentre dans ses droits et renverse l’ordre de choses qui les violait tous, elle ne peut en un instant se trouver établie et

4, Voir la préface de L. Becq de Fouquières aux Œuvres de François de Pange (Paris, 1872).

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