Un Agent des princes pendant la Révolution : le Marquis de La Rouërie et la conjuration bretonne 1790-1793 : d'après des documents inédits

LE CHATEAU DE LA ROUËRIE 105

autres se sont également dévoués en donnant tous leurs moyens. Il à été nécessaire de fournir à vos besoins et de le faire de manière à ce que vous ayez tous les mêmes avantages. À cet égard, nous pensons que la somme de vingt sols par jour serait suffisante pour les vivres et les nécessités de chacun de vous... »

La Rouërie termina son discours par quelques conseils de modération et de discipline : la victoire paraissait si certaine et si facile à l’ardeur de ses affiliés que l'enthousiasme et la joie de tous éclajaient sans retenue. Et ce dut être une scène d'une étrange solennité que la réunion de ces jeunes gentilshommes, abandonnant châteaux et famille, ceignant l'épée, acclamant le chef sous lequel ils allaient combattre. Sans doute, ils estimaient le succès assuré ; aucun d’eux, certes, ne prévoyait que le serment qu'ils prononçaient les vouait pour de longues années à la vie aventureuse des partisans, aux plus atroces privations, aux nuits sans repos, aux hivers sans abri, à la misère des proscrits, cachés dans les bois, traqués comme des bêtes malfaisantes.. Combien de ceux qui se rencontrèrent là devaient tomber dans les genèts! Combien donnaient à cette heure un rendez-vous à la mort! La chouannerie venait de naître, avec sesrages héroïques, ses désespoirs tenaces, ses inénarrables désastres, — avec sa grandeur aussi,