Un Agent des princes pendant la Révolution : le Marquis de La Rouërie et la conjuration bretonne 1790-1793 : d'après des documents inédits

148 LE MARQUIS DE LA ROUËRIE

son côté, trouva dans le contrebandier une de ces natures ardentes qu'il aimait, un homme d’une intrépidité folle, d'une endurance fanatique, d'un royalisme désintéressé et farouche, comme il en avait jusque-là trop peu rencontrés, à son gré. Il se livra tout entier à Cottereau, lui apprit ses projets, lui révéla son plan, la stratégie de la campagne qu'il allait entreprendre, stratégie qu'il n'avait encore dévoilée à aucun de ses affiliés, non point par méfiance, mais par crainte des critiques, des remontrances ou des railleries.

Ce qu'il méditait, en effet, c'était une façon nouvelle de combattre, une guerre de partisans, d'embuscades, de ruses, appropriée au courage sournois des paysans et où les landes et les haies de sa chère Bretagne, qu'il connaissait mieux que personne, joueraient le principal rôle. Il dit le parti qu'on pouvait tirer des routes du pays, presque toujours en déblai, bordées par des rochers et de hautes levées de terre couvertes d’ajoncs offrant des abris inaccessibles : il montra propices aux guets-apens ces bas chemins, ces champs, clos de broussailles et de lignes d'arbres, qui ne permettaient pas à la vue de s'étendre à plus de cent toises.….

Cottereau l’écoutait religieusement, s’imprégnant de ses paroles ; le soir, il regagnait sa hutte, grisé, la tète en feu, rèvant aventures et combats.