Un Agent des princes pendant la Révolution : le Marquis de La Rouërie et la conjuration bretonne 1790-1793 : d'après des documents inédits

192 LE MARQUIS DE LA ROUËRIE

demi en papier-monnaie falsifié : il en inonderait la France, dans le double but de solder ainsi ses agents de l’intérieur, — ilne dissimulait pas qu'il en avait soudoyé dans tout le royaume, — et, en second lieu, d'amener, par la propagation de cette masse d’assignats sans valeur, le discrédit sur ceux régulièrement émis par la République.

Ïl traita Chévetel en ami et ne lui cacha rien de ses espérances.

_— Restez à Londres, lui dit-il, venez quelquefois me voiret, quand il en sera temps, je vous ferai passer en Bretagne.

Mais il se ravisa et, comme il ne pouvait quitter Londres où ses créanciers l'avaient mis en surveillance, il dépècha Chévetel vers le comte d'Artois, le chargeant de conseiller aux frères de Louis XVI de « tourner désormais toutes leurs vues du côté de la Bretagne et de la Normandie : une Compagnie de navigation hollandaise s’était engagée à transporter les restes de l’armée royale d'Ostende à Saint-Malo; on était sûr que cette ville se rendrait aux Princes à la première sommation, et l’on serait également maître de la baie de Cancale, du fort de Châteauneuf, et, par suite, du Clos-Poulet?, qui devait servir de camp retranché

1. Récit de Chévetel. 2, On appelait ainsi la partie du département d'Ille-et-Viluine comprise entre Saint-Malo, Cancale et la Rance.