Un Agent des princes pendant la Révolution : le Marquis de La Rouërie et la conjuration bretonne 1790-1793 : d'après des documents inédits

266 LE MARQUIS DE LA ROUËRIE

Il faut reconnaitre que Lalligand joua, en grand artiste, son double rôle. Il commença par questionner Chévelel, à qui il demanda, sans rire, son nom et sa profession ; le juge de paix Chartier semble n'avoir rien compris à la comédie : il consigna dans son procès-verbal! la réponse de Chévetel, sans s'étonner que l’interrogatoire ne fût pas poussé plus avant. Lalligand, très adroitement d’ailleurs, se montra, tout d’abord, aussi réservé à l'égard des autres prévenus : il leur posa quelques questions sur l'évasion de Desilles, sur leurs relations avec la Rouërie et sur le dépôt de ses papiers, dont ils affirmèrent n'avoir aucune connaissance. Tous déclarent unanimement « vouloir être présents aux perquisitions qui vont avoir lieu ». Cette formalité remplie, on se met à table, on dine, et vers deux heures et demie les fouilles commencent.

Cinq paysans, armés de pioches et de pelles, recoivent l’ordre d'ouvrir une tranchée dans le premier carré du parterre : les recherches poussées rapidement et « pour la forme », puisque Lalligand connaissait d'avance l'emplacement exact de la cachette, ne donnaient, naturelle-

1. Ce procès-verbal est rédigé d'une facon très confuse dans le seul but de ne pas compromettre Chévetel, dont le nom et la profession sont seuls mentionnés avec ceux des autres témoins de la perquisition, — Archives nationales, W, 274.