Un agent secret sous la révolution et l'empire : le Comte d'Antraigues

VOYAGE EN ORIENT (1778-1779). 19

le gouvernement de Pologne, un traité de politique expérimentale. Il suggéra à d’Antraigues l'idée d'un travail semblable sur l'empire ture, et lui en traçca même le plan. Le jeune homme fit mieux; il résolut d’en aller recueillir sur place les éléments. Il méditait depuis quelque temps un voyage en Italie; un amour contrarié, le regret d’une liaison brisée se joignirent à la curiosité pour l’éloigner encore davantage de son pays. Ilse décida à suivre en Orient son oncle le comte de Saint-Priest, nommé ambassadeur du roi auprès de la Porte. Ce voyage donna lieu à un livre, demeuré manuscrit, qui est le premier de son auteur en date, en étendue et peut-être en intérêt.

Il

VOYAGE EN ORIEXT (1778-1779).

D’Antraigues, à l’âge de vingt-cinq ans, se posait en homme de la nature, concevant la politique selon le Contrat social, la religion selon le Vicaire savoyard, et l'amour selon la Nouvelle Héloïse ; il déclamait volontiers contre la superstition et le despotisme, et même, un peu plus ouvertement que ses illustres contemporains, contre le christianisme et la monarchie française.

La première page de ses récits sur l'Orient révèle clairement sa pensée. Là, le jeune ami de Rousseau reprend sur le mode philosophique le thème huguenot de la France-Turquie. Entre le royaume de Louis XVI et l'Orient décrépit il ne voit point de différence, pas plus qu'entre le sujet et l’esclave. Il se considère comme sans patrie, depuis que dans son pays une certaine urba-