Un témoin de la Révolution française : Journal de Benjamin Cuendet de Sainte-Croix (Suisse), officier de la garde nationale à Lyon, 1769-1815 : ouvrage orné de deux portraits et de planches en fac-simile

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— Le 25 prairial, an VIIE, le général Desaix a été tué dans la bataille de Marengo.

— Le 10 messidor, le grand, le brave, le digne Bonaparte a passé à Villefranche à 2 heures 3/4 de l'après-midi venant d'Italie. Que Dieu le conserve ! !

— Le 1° août 1800, Cuendet aîné s'est établi à Lyon, — et dans le mois de février 1804 à Pontdevaux.

première bataille de Stockach, qui eut lieu le °° mars 1799 et dans laquelle Jourdan fut défait par l’archidue Charles; François Cuendet dut être blessé au cours de la marche foudroyante du général Lecourbe (30 avril 1800), qui franchit le Rhin entre Schaffhouse et Stein et s'établit victorieusement dans le pays de Bade entre le Rhin, le lac de Constance et Stockach, victoire de Lecourbe sur le général autrichien Kray.

De retour à Villefranche, François s’occupa d'y faire venir sa jeune femme, Elisabeth Tenniell, qu'il avait laissée à Londres avec son enfant. Voici un fragment d’une lettre qu'il lui adressait dès le 25 mai :

« Très chère et tendre amie,

« Je viens après dix ans de revoir mes Dieux Pénates. C’est avec la plus vive satisfaction que j'ai retrouvé toute ma famille en parfaite santé; il ne manque à mon bonheur que ta présence et celle de notre cher enfant... Viens donc contenter une famille qui l'attend les bras ouverts et te fera oublier les chagrins dont je suis la cause innocenlie. Je te dirai qu’en rentrant en France, je fus arrêté comme réquisitionnaire et fus contraint de rejoindre mon corps, où je suis resté jusqu'au 3 mai de cette année où j'ai été blessé d’un coup de balle à la cuisse de l’autre côté du Rhin. Cela m'a valu ma feuille de route et mon congé absolu pour rentrer chez mon père... »

Mais une lettre ultérieure d'un correspondant de B. Cuendet, le citoyen Defazy, qui se trouvait pour ses affaires à Calais en octobre 1800, nous apprend que l’arrivée en France d'Elisabeth ne fut pas sans rencontrer d'assez sérieuses difficultés, en raison des circonstances politiques. Voici ce que le citoyen Defazy écrivait, à ce sujet, à son ami B. Cuendet :

« Calais, 16 vendémiaire, an 9.

« .… Le Commissaire du Gouvernement à Calais m'a dit très positivement qu'il serait obligé de retenir ici votre bru jusqu'à ce qu'elle eût obtenu un passeport de Paris... Je vous prie et vous invite donc, citoyen, de suivre les renseignements que le cit. Mingaud, commissaire du Gouvernement, et qui paraît aimer à rendre service, m'a donnés. Il vous faut aller voir votre souspréfet avec qui je me rappelle avec plaisir vous avoir entendu dire que vous êles assez bien; vous ferez une pétition énergique et très courte au nom de votre fils; le sous-préfet la recommandera au préfet à Lyon qui l’enverra au ministre de la police générale... Les rentrées fréquentes des Emigrés qui cherchent toujours à déchirer le sein de leur Patrie obligent les agents du Gouvernement à être sur leurs gardes... »

(Archives de l’auteur.)

1 Cette note tout entière a été biffée ultérieurement sur le carnet, en travers, par une grande X. Il est à présumer que Cuendet, républicain dans l’âme, a modéré, par la suite, son premier enthousiasme pour Bonaparte,