Vergniaud : 1753-1793

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locaux, tels que tout grand changement en entraîne toujours; mais jamais, on peut bien le dire, révolution n'avait coûté moins de sang. Malheureusement la lutte, envenimée par une résistance opiniâtre et aveugle, va s'engager terrible et les sombres tristesses vont commencer.

La confiance, d’ailleurs, n’était qu’à la surface. Les cris de joie, poussés à Paris, n'empéchaient pas d'entendre les imprécations de Coblentz et le tocsin de la Vendée. On savait que la déclaration de Pilnitz avait répondu à l’appel des émigrés, et on ne pouvait oublier, avec la fuite à Varennes, les motions nombreuses qui, parties soit de la province, soit de Paris, avaient suivi le retour du roi.

Vergniaud était l'auteur d’une de ces motions, Le 9 juillet, à Bordeaux, il avait à la Société des amis de la Constitution, proposé une adresse où il disait : « Nous croyons que le grand procès qui va s’instruire doit être renvoyé à la haute Cour nationale. Si par le résultat de la procédure le roi est trouvé coupable, la nation doit être consultée sur sa destitution. »

Or, il n’est pas téméraire d’affirmer qu'après son élection, Vergniaud eût une pensée dominante, dont la réalisation pouvait sauver la royauté : c'était de mettre Louis XVI en demeure d'opter définitivement et de lui faire consentir des actes prouvant aux plus incrédules qu'il avait, sans aucune arrière-pensée, accepté toute la constitution.

L'Assemblée législative était réunie depuis quelques semaines, et Brissot, Louvet, Grangeneuve, Fauchet, avaient déjà pris la parole; les deux amis de Vergniaud, ses confrères du barreau de Bordeaux, l’impétueux Guadet et l’austère Gensonné avaient également, et avec succès, abordé la tribune. Lui seul,