Vergniaud : 1753-1793

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Enfin le vote est terminé. « Citoyens, dit Vergniaud de sa voix grave et triste, je vais proclamer le résultat du scrutin. Vous allez exercer un grand acte de justice. J'espère que l'humanité vous engagera à garder le plus profond silence; quand la justice a parlé l'humanité doit avoir son tour. Je déclare, au nom de la Convention nationale, que la peine qu’elle prononce contre Louis Capet est la peine de mort. »

Après avoir tout fait pour éviter cette mort, Vergniaud l’avait votée. À quel sentiment a-t-il donc obéi et s'est-il souvenu des circonstances atténuantes si nombreuses qui couvraient Louis XVI : le ministère Turgot, les pensées de réforme, la convocation après plus de deux siècles des États généraux, la gloire maritime du règne : Cherbourg et la guerre d'Amérique? Oui, il s’est souvenu, et a fait cet effort suprême que J'ai rappelé, et qui devait plus tard le conduire à l'échafaud. Puis, sa conscience étant acquittée, comme il l’a dit lui-même, il s’est incliné devant le vote de la majorité, ne gardant plus dans son âme de juge que le souvenir de l'appel à l'étranger si souvent et si ouvertement dénoncé par lui. Jamais, il faut bien le dire, la conscience n’a été soumise à une pareille épreuve. « Dans mon opinion, porte le vote motivé de Carnot, la justice veut que Louis meure et la politique le veut également. Jamais, je l'avoue, devoir ne pesa davantage sur mon cœur que celui qui m'est imposé.» « Condamner un homme à la mort, dit Ducos, voilà de tous les sacrifices que j’ai faits à ma patrie, le seul qui mérite d’être compté. » Et Vergniaud enfin : « J’ai voté pour que le décret fut soumis à la sanction du peuple, la Convention nationale en a décidé autrement ; j'obéis, ma conscience est acquittée. J’ai déclaré hier que je reconnaissais Louis XVI