Catherine II et la Révolution française d'après de nouveaux documents

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style imagé, je ne veux pas perdre un pouce de terrain. Les États ne sont morgué pas des fossés ; plus onen ôte de terrain de ceux-là, plusilsdeviennent grands.» (1) Et peu d'années avant sa mort, elle dira : « Ce qu’il y a de sûr, c'est que je n’ai jamais rien entrepris sans avoir été intimement persuadée que ce que je faisais était conforme au bien de mon Empire. » Elle dit l’exacte vérité.

En se faisänt russe elle ne garda rien de son origine allemande ; si ce n’est, peut-être, cette particulière disposition à la philosophie et à la libre discussion, et cette curiosité de savoir le pourquoi des choses quise rencontrent quelquefois en l'âme allemande. Encore faut-il dire que son caractère essentiellement pratique et les exigences de sa politique entravèrent plus d’une fois ces tendances. Ils ne les étouffèrent jamais entièrement. Aussi pouvait-elle écrire en 1789 : « J'ai fait cas de la philosophie, parce que mon âme a toujours été sincèrement républicaine. » Elle n'avait pas mieux dit en 1776, quand elle expliquait à Grimm revenant de Rome,pourquoi il avait si souvent pensé à elle : « C’est parce que vous avez trouvé si peu d'anciens Romains là-bas ; cela vous a retracé le souvenir de l’âme la plus républicaine que vous connaissiez, et par hasard c'est moi. »

Que faut-il penser du républicanisme de Catherine ? Nous serions bien imprudents de la eroire sur parole à cet égard. Son républicanisme est d’une essence particulière. La république la plus idéale n'aurait pas été de

(1) Lettre du 2 décembre 1787,