Catherine II et la Révolution française d'après de nouveaux documents

LA FRANCE DE L'ENCYCLOPÉDIE 23

ble dans les cours de Suède, de Danemark et d’Allemagne. Elle n'aura pas de mots assez vifs pour condamner les souverains qui vivent d’arbitraire et de persécutions. L’Impératrice recevra Diderot et Falconet ; elle leur fera le meilleur accueil. Elle consultera Diderot, et Diderot lui exposera ses théories. 11 le fera avec animation, avec enthousiasme. Il est éloquent ; l’Impératrice, très calme, l'écoute avec complaisance : elle est peutêtre sous le charme, mais elle ne se laisse pas convaincre. Elle dispute point par point les théories du philosophe, l’approuve souvent, mais quand'il va trop loin se contente de lui faire remarquer que la peau humaine sur laquelle elle travaille est autrement chatouilleuse que le papier. Diderot quitte Pétersbourgenchanté, etenvoie à sa souveraine des plans sur une Université. Catherine les examinera et les annotera avec soin. Diderot sera un des premiers qu’elle reniera, mais il fut un temps où elle écouta ses théories avec faveur et où elle se complut à en appliquer la partie qui lui parut réalisable.

Elle fait le même accueil empressé à Falconet. Tandis qu'il travaille à la statue de Pierre le Grand, elle engage avec lui une correspondance, où, à côté d’aperçus lumineux sur le jugement de la postérité, elle pose des principes d’un libéralisme qui n’est pas douteux. A l'école de Montesquieu et de Voltaire elle ne peut avoir appris que des notions de liberté et de justice.

Il n’est pas jusqu'à Ségur, qui sera ambassadeur de France à St-Pétersbourg de 1783 à 1789, et jusqu'au Prince de Ligne, avec lesquels elle n’ait des entretiens