Colonies pendant la Révolution : la constituante et la réforme coloniale

LÉGISLATION CONTRADICTOIRE 225

France et parlant au nom de Bourbon, il put opposer les unes aux autres des colonies, dont la situation était la même et les sentiments contraires. Dans les îles du Sud il y à 120.000 esclaves et quelques milliers de mulâtres ou affranchis. Les assemblées coloniales de Port-Louis et de SaintPaul n’en ont pas moins voté l'égalité politique des noirs libres et des blancs : celle de Port-Louis a donné à ses députés mandat spécial de plaider la cause des libres de couleur, « dont la sagesse et le patriotisme sont dignes d'éloges! ». Les mulâtres de Saint-Domingue, ayant mêmes mérites, ne doivent-ils pas recevoir même traitement ? Si les blancs s'y opposent, c'est qu'au lieu de patriotisme et d'équité ils n'ont au cœur qu'orgueil et égoïsme !

L'abbé Maury, qui intervint au débat comme adversaire des noirs, dont il avait naguère défendu la cause?, voulut faire, après le discours de Monneron, une diversion sensationnelle. Pour fortifier l'argument liré de l'ambition anglaise, il prétendit savoir que le ministre était averti des armements faits en Angleterre, et il demanda une enquête sur le fait. De Menou., au nom du Comité diplomatique,

1. Moreau de Saint-Méry ayant affirmé, dans la Feuille du Jour, du 13 septembre, que Monneron avait outrepassé son mandat, celui-ci lui répondit en publiant les articles 4 et 5 de ses pouvoirs, ainsi conçus: « Arr. 4: l'Assemblée rend justice à la conduite des nègres libres, et, sans se prononcer, désire que justice leur soit rendue ; — Arr. 5: l'Assemblée rend justice aux Amis des Noirs, mais ne peut admettre la suppression immédiate de l'esclavage (pièce in-8° de 7 p.). »

2. Dans la discussion sur le décret du 8 mars (V. plus haut, chap. u, 23).

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