Colonies pendant la Révolution : la constituante et la réforme coloniale

248 L'ÉTAT DES PERSONNES

Plaisance, au Port-Margot, à la Grande-Rivière, au quartier Morin, à Limonade, etc. Cinquante mille nègres sont en armes et commettent toutes sortes d’atrocités, incendies, viols, assassinats, tortures. Rien ne semble pouvoir satisfaire leur férocité native ou leur soif de représailles ; ils obéissent aux plus cruels et aux plus sauvages d’entre eux, Biassou, Jean François, Bouckmann!.

D'où venait cette furie et qui avait donné le mot d'ordre ? De Blanchelande ? ne manque pas d’en accuser formellement les Amis des noirs, qui auraient envoyé des émissaires secrets, el nommément Grégoire, dontla lettre aux noirs de SaintDomingue* aurait circulé dans l'ile dès la fin de juillet. Mais Brissot s’écriera plus tard devant la Législative : « Je m'offre, moi et mes collègues, à l’échafaud, si l’on trouve une seule correspondance, un seul émissaire envoyé aux colonies par la Société des Amis des Noirs; » et Tarbé, un adversaire pourtant, reconnut dans son rapport que l’on n'avait trouvé aucune trace de cette criminelle propagande. On trouva, au contraire, sur

1. Discours de Bouckmann (cité par L. Blanc, VI, ch. x, p. 66): « Bon Dié... la zot tendé caché dans yout nuage. Et là li gardé nous. 11 vouai tout ca blancs fait, Bon Dié blanc mandé crime et pornous vlé benfets, mais Dié là qui si bon ordonne nous vengeance. ». — On sait que Victor Hugo, « l'enfant de génie », à fait de la révolte des noirs de Saint-Domingue le sujet de sa première œuvre, Bug-Jargal.

2, Mém. justif.

3. Elle contenait cette phrase, tant incriminée : « Bientôt le soleil qui féconde les colonies n’éclairera plus que des hommes libres. »

4. Arch. parlem., séance du 3 décembre 1791, XXXV, 536.

5. Séance du 11 janvier 1792 ; Moniteur du 12 janvier.