Correspondance de Thomas Lindet pendant la Constituante et la Législative (1789-1792)

CONSTITUANTE (2 MARS 1791) 269

été sacrés par M. l’évêque d’Autun, ancien, assisté de MM. de Lydda et de Babylone. Des lettres anonymes avaient menacé d’assassiner et de fusiller même au pied de l'autel les cinq prélats. L'évêque de Babylone avait peur, et il a fallu relever son courage par des précautions. Ils ont couché tous les. cinq à l’Oratoire. Hier matin, la garde nationale, très nombreuse, a garni l'église; la musique est arrivée, le peuple est accouru à la cérémonie dont il n’était pas prévenu. Le président et plusieurs députés, le garde des sceaux, le maire et le commandant y ont assisté.

Les nouveaux évêques sont venus à l’Assemblée décorés de la croix : ils ont été applaudis, excepté par le côté droit, qui a dit qu’on élève autel contre autel.

Mesdames tantes du roi ont été arrêtées à Arnay-leDuc, et il n'avait pas été aussi facile de les dégager qu’on l'avait fait près Fontainebleau. Le décret de l Assemblée à leur égard n’a pas plu aux habitants de la capitale, qui se sont portés hier en foule aux Tuileries pour demander au roi le rappel de Mesdames. Incessamment on aura une loi sur les émigrants. Solon condamnait à mort les citoyens qui ne prenaient pas parti dans les querelles d'Athènes : la loi était sévère, mais elle avait un sens bien profond. (Papiers R. Lindet.) ‘

CLIX. — Au même. Paris, le 2 mars 1791.

Mon frère, encore un orage passé, et l'aristocratie honteusement déjouée. Pendant que quelques bandits entrainaientle peuple à Vincennes pour démolir ce château sous prétexte que des souterrains correspondaient jusque dans l'intérieur de Paris, et pouvaient faciliter les moyens de le surprendre, d’autres brigands, d’une autre classe, s’attroupaient aux Tuileries. On espérait que toute la garde de Paris se porterait à Vincennes et que les Tuileries se-