Correspondance de Thomas Lindet pendant la Constituante et la Législative (1789-1792)

CONSTITUANTE (5 JUIN 1791) 270

mettrait de jouir des biens de ce bas monde et de renoncer à ses chagrins. |

Nos non-conformistes ne désespèrent de rien : ils ont ouvert, le jour del’Ascension, l’église des Théatins. Si cela avait bien réussi, ils en auraient bien auguré; cela ne s’est pas bien passé ; ils en prennent occasion de déclamer contre la violation. de la liberté et le mépris des décrets. Quelques prêtres furent envoyés pour essai; ils dirent leurs messes; une douzaine de dévotes communièrent. Le peuple se chagrina, entra dans l’église, nonobstant l’écriteau: — Edifice consacré au culte religieux par une société particulière, paixet liberté; il chassa les prêtres et les dévotes, renversa l’autel et les saints. Ainsi, malgre les décrets, le peuple s’obstine à dire qu'ils ne faut pas deux cultes catholiques, que les non-conformistes ne s’assemblent que pour prêcher contre la Constitution, qu'ils ne songent qu'à lui faire la guerre sous prétexte de prier Dieu, qu’ils ne forment d’assemblée que pour calculer leurs forces, échauffer les esprits et concerter leurs moyens. Les décrets de l’Assemblée sont fondés sur des principes vrais, et l'opinion du peuple est fondée sur les faits qui ne sont pas moins vrais.

P.-S. — Aujourd’hui, grand mouvement des gardes nationales pour protéger les non-conformistes théatins.

On ne pendra plus, parce que les Parisiens ont pendu. On décollera, quoiqu’ils aient porté des têtes au bout d'une pique. Les gentilshommes ne se sentaient pas de goût pour la potence, quoiqu'ils aient perdu leur privilège. Ils ont mieux aimé s'associer tous les coquins de bas aloi dans les honneurs de la décollation.

On verra le sang ruisseler, on applaudira à l’habileté d’un bourreau bien exercé qui séparera proprement une tête du tronc, et cela adoucira les mœurs. (Papiers R. Lindet.)