Correspondance de Thomas Lindet pendant la Constituante et la Législative (1789-1792)

CONSTITUANTE (1* AOÛT 1791) 303 CLXXXI. — Au même. Paris, le 22 juillet 1791.

Mon frère, Louis XVI est gardé à vue, de peur qu’on ne l’enlève.

Il n’est pas jugé, il n’est pas condamné. C’est un rouage qu'on a démonté, parce que son mouvement empêchaït de réparer la machine : les réparations et reconstructions faites, on reportera la roue à sa place, et la machine se mettra en mouvement (1).(Papiers R. Lindet.)

CLXKXKXII. — Au même. Le 1* août 1791.

Mon frère, il faut avouer que nous sommes bien mal servis. Plusieurs de nos ministres sont évidemment des fripons; notre Comité militaire est triparti d’aristocrates. d’imbéciles et de fripons. Notre Comité des finances est composé de coquins qui spéculent pour avoir le dernier

(1) Buschey des Noës continuait cependant ses démarches pour obtenir l’affiliation aux Feuillants de la Société des Amis de la Constitution de Bernay. Dans sa lettre du 19 juillet (Arch. Bernay), il justifie encore le schisme intervenu. « Notre séparation fait un schisme toujours malheureux, mais l’exaltation de nos frères et leur déviation des principes de la Constitution nous en ont imposé le devoir; d'autre côté, elle a rappelé à nous d'anciens frères qui s'étaient séparés pour aller former le club de 1789 : les Siéyès, Talleyrand-Périgord, Target, Thouret, les deux Crillon, La Rochefoucauld, etc. » Le 26 juillet, il revient à la charge pour demander la liste des enbiee, la copie du règlement de la Société et l'agrément de deux Sociétés voisines déjà affiliées. II termine par ces mots : « Déjà, l’on dit ici que Louis XVI a un Code de constitution tout prêt, qu'il présentera à l'Assemblée au moment où elle offrira le sien. L'on répond que, la souveraineté nationale résidant essentiellement dans la nation, c'est à elle de faire la loi, qu'elle ne la peut recevoir de nul homme ; que c'est à Louis XVI de déclarer s’il accepte, ne pouvant être rétabli fonctionnaire dot qu’à cette condition. » Dans une autre lettre du 29, Buschey envisage l'hypothèse d'une régence ou d’un changement de gouvernement. « Si régence, à qui la déférers- t-on... Si changement de gouvernement, quel adoptera-t-on? Dans tout autre que le monarchique, il faut Sénat, Congrès ou Conseil électifs ou permanents; plus d'unité, mais cabales et divisions! — Dieu garde à notre patrie que ses représentants présents et futurs se trouvent jamais forcés d'opter entre de pareils extrêmes! J'espère toujours, Messieurs, que le dénouement sera heureux. (Arch. Bernay.)