Correspondance inédite de La Fayette : lettres de prison, lettres d'exil (1793-1801)

384 CORRESPONDANCE DE LA FAYETTE

lui restera pas un revenu suffisant pour vivre passablement à la campagne où il s’est retiré”.

Cette médiocrité de fortune est honorable, sans doute, lorsqu'on pense qu'il en a sacrifié volontairement une moitié à la cause des nations qu’il a servies, et que l’autre moitié lui a été enlevée pour n'avoir pas voulu concourir à la violation des lois nationales qu'il avait jurées. Elle est d’autant plus honorable que l’on connait davantage quels sont les moyens qu'il a eus de satisfaire tous les genres d’ambition; mais je sens comme vous que cette situation est pénible pour ses amis et pour les peuples auxquels il a consacré ses travaux.

Elle devient plus fâcheuse encore en faisant attention aux dettes, qui absorberaient la presque totalité de ses revenus, si l'on ne trouvait pas moyen de le délivrer de cette charge. Ne croyez pourtant pas qu'il soit tellement obéré que vous ayez besoin, comme vous l’indiquez par votre lettre, de mettre ce que vous ferez pour lui à l'abri de ses créanciers. Z{ ne consentirait pas & un arrangement par lequel ils seraient frustrés de ce qu'il leur doit. Il a déjà trouvé moyen, depuis son retour, d’acquitter plusieurs dettes, et la plupart de celles qui lui restent sont des sommes dues aux ministres, agents ou citoyens des États-Unis d'Amérique. M. Dupont”, son ancien collègue à l'Assemblée constituante, actuellement établi à New-York, a dans ses mains un état des dettes du général La Fayette envers M. Gouverneur Morris, M. King, M. Parish, les deux premiers étant alors

1, Sa fille aînée était mariée depuis 1798 avec Charles de Latour-Maubourg; mais c'était, selon la tante de Tessé, le mariage de la faim avec la soif.

2. De Nemours. (Cf. lettre XLIIS, p. 336, note 2.)