Danton émigré : recherches sur la diplomatie de la République an 1er-1793

LA POLITIQUE DE DANTON. 123

«— Je ne suis pas de votre avis, répondis-je ; M. de Staël est le « gendre de M. Necker, avec qui il ne cesse de correspondre à « Coppet. C'est connu : M. Necker et sa fille, Mme de Staël, sont « bien plus Anglais que Français ; cette proposition d'alliance et de « coopération maritime pour le prix de quelques millions est une « spéculation fiscale plutôt qu'une opération diplomatique. Je ne « vous cache point ma façon de penser : je suis conire la proposi« tion. Je dirai cette opinion ce soir au Comité si vous y venez. »

« Je tins parole. M. de Staël était présent (1). Danton vint au Comité m'écouter, et me combattit par des considérations générales. « Le Comité ajourna toutes les propostions de l'ambassadeur de Suède. En effet, il n'avait ni assez de confiance en celte proposition, ni assez de fonds disponibles.

« Plusieurs jours se passèrent sans que j'en entendisse parler. Danton vint à moi dans l’Assemblée etme dit qu'il avait pensé à l'affaire de Suède : que j'avais eu raison; mais qu'il restait un moyen bien simple de s'assurer si l'exécution de cette coopération maritime était praticable dans un délai fixé; qu'en conséquence il fallait se contenter de faire repartir M. de Staël pour Stockholm dans le but de déterminer avec précision le nombre, la qualité des vaisseaux el irégales que la Suède pouvait armer dans un court délai pour la cause de la République française (2); qu'on fixerait sévèrement la somme que la France donnerait pour les frais de cette coopération navale.

« Dans ce cas, dis-je à Danton, M. de Staël n'a qu'à se rendre « en Suède; cela ne nous regarde plus jusqu'à ce qu'il soit revenu « avec une réponse calégorique.

« — Sans doute, répliqua Danton; mais il faut lui avancer « 600,000 francs pour faire son voyage, et nous aider à Stockholm « au succès diplomatique de la proposition qu'il nous a faite. |

« — Je n’adopte aucune dépense à cet égard, ni aucune proposi« tion à faire ; parlez vous-même au Comité; s’il veut vous donner

(1) Pas un mot sur Barère et sa prétendue opposition au projet d'alliance, dans la correspondance de M. de Staël, pas une ligne, pas la moindre allusion ! :

Au reste, personne, ici, n'innovait.

La Suède, comme d'autres petits Etats, se trouvait, bien avant 4792, dans la sphère d'attraction de la France ef en recevait un subside annuel.

Danton ne faisait, par ce nouveau traité, que consolider et accroître des relations existantes,

(2) Etait-il donc nécessaire que l'ambassadeur de Suède se dérangeât pour avoir ce renseignement? — R.