Danton émigré : recherches sur la diplomatie de la République an 1er-1793

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“une somme pour payer d'avance la coopération de l'ambassadeur, « le Comité en est responsable. Ne me cilez en rien. »

« Danton ne demandait pas mieux que de n'avoir pas un rapport contraire; il profita d’un moment où je faisais des rapports à la Convention; et j'appris le lendemain que le Comité, obsédé par Danton et par M. de Staël, avait chargé le ministre des Affaires étrangères de faire compler à ce dernier (à l’ambassadeur) cent mille écus pour son voyage et sa négociation en Suède.

« Je dis au Comité que c'était de l'argent bien hasardé,

M. de Staël et Danton reçurent les cent mille écus (1). M. de Staël partit, il est vrai, de Paris, mais à ne dépassa jamais le luc de Genève. C'est à Coppet, chez son beau-père, M. Necker, qu'il alla s'établir, et non à Stockholm. Plus jamais on n’entendit parler de la négociation de celte prétendue coopération navale de la Suède. Cest à Coppet que M. de Staël recevait constamment les bulletins diplomatiques et les nouvelles secrètes de tout ce qui se passait à Paris depuis cette époque (mai 1793) jusqu'au mois denovembre 1194, époque à laquelle M. de Staël revint de Coppet à Paris, pour suivre les nouveaux événements de la réaction qui devait déshonorer et renverser la Convention nationale par ses propres mains (2). »

Aïnsi, M. de Staël-Holstein et Danton s'étaient mis d'accord pour escroquer à la République chacun trois cent mille francs, et ni le ministre compétent, ni la trésorerie nationale, ni le comité de Salut public ne s’en était douté. L'ambassadeur n’était point retourné à Stockholm, il s'était arrêté en Suisse pour mettre à couvert le produit de sa filouterie, tout comme Danton avait dissipé le sien en orgies chez Rosse, au restaurant de la rue Grange-Batelière ; Barère lui-même, par excès de bienveillance (qui n’a pas ses défauts ?), avait gardé le silence sur cette vilaine farce, alors et pendant le procès

(1) Pourquoi Danton? A quel titre Lebrun, girondin et adversaire polilique du montagnard, l’aurait-il fait bénéficier de tout ou partie de la somme remise à l'ambassadeur de Suède? Si encore Barère avait prétendu que les deux compères avaient partagé euxmêmes! Mais non, c'est le ministre des Affaires étrangères de la République par qui il fait remettre le prix du courtage! Qui dit trop ne ditrien, — R.

(2) Mémoires de Barère, T. II, p. 87-90,