Danton émigré : recherches sur la diplomatie de la République an 1er-1793

12 : DANTON ÉMIGRÉ.

Nommé membre du directoire du département de la Seine, avec Sieyès, le duc de La Rochefoucauld, Ræderer, etc., il fut chargé, sous l’Assemblée législative, d’une importante mission en Angleterre. L'interdiction des fonctions exécutives, que s'étaient imposée les députés de la Constituante, ne permit pas de lui conférer le titre d’ambassadeur, dont M. de Chauvelin avait été revêtu; mais il fut spécialement accrédité auprès du gouvernement anglais, dès le printemps de 17992, pour établir une alliance nationale, en opposition à l'alliance de famille que les agents de la cour resserraient sur le continent avec les maisons d'Autriche et de Bourbon.

« L'état précaire de la Révolution et le désaccord violent des partis disposaient peu le gouvernement anglais à s'engager dans une union étroite avec la France; mais, à défaut d'alliance, M. de Talleyrand obtint une déclaration de neutralité qui était presque aussi utile, et qui désespéra les partisans de la coalition européenne, dont le désir était de presser la Révolution entre les armées continentales et les flottes britanniques. Telle fut la première négociation de M. de Talleyrand, qui commencçait sa carrière diplomatique par où il l’a finie, poursuivant, à quarante ans de distance, le même but, dans le même

pays. » — (Notice historique, lue dans la séance du 11 mai 1839, à l'Académie des sciences morales et politiques.) Eh bien, le négociateur de l’alhiance nationale cessat-il toutes relations avec son ancien collègue du département de Paris, avec le président des Cordeliers, lorsqu'il fut envoyé en ambassäde à Londres? Cela n’est pas probable. Car, après le 40 août, en septembre 1792, celui-ci, alors membre du conseil Exécutif, le fit, dit-on, maintenir à son poste.

Dès lors, il nous paraît évident que Talleyrand dut être, en Angleterre, le principal agent de l'entente qui s'établit entre le conventionnel et les chefs du parti révolutionnaire britannique.

Cette manière de voir est fortifiée par un autre passage des Mémoires de Governor Morris; parmi les reproches, as-