Danton émigré : recherches sur la diplomatie de la République an 1er-1793

70 . DANTON ÉMIGRÉ.

que vous avez fait à celui qui ne vous fit jamais de mal et qui ne songea jamais à vous en faire.

«Je ne connais pas plus qu'aucun de vous le placard incendiaire qu'on dit vous avoir tant indignés, et je le désapprouve tout autant, quoiqu'on en ait fait le prétexte ostensible de tous les désordres qui se sont commis. A la célébration de la Révolution française, à laquelle je n’assistai point, la compagnie qui s'assembla à cette occasion ne témoigna que sa joie de voir une nation voisine affranchie de la tyrannie sous laquelle elle gémissait depuis plusieurs siècles, et ne manifesta que le désir de voir améliorer notre Constitution, amélioration que les citoyens sages de toutes les religions souhaitent depuis longtemps.

« Quoique, en réponse aux calomnies grossières et injustes de mes ennemis, j'aie défendu publiquement mes principes de nonconformiste, je n'ai employé que des arguments simples, modédérés et sans aigreur. Nous connaissons trop bien l'esprit de douceur et de patience du christianisme pour songer jamais à avoir recours à la violence; et pouvez-vous croire que la conduite que vous venez de tenir fasse préférer vos principes religieux aux nôtres ?

«Vous vous trompezencore plus si vous vousimaginez qu'une telle conduite puisse servir votre caste ou nuire à la nôtre. Il n'y a que la raison et des arguments solides qui puissent venir à l’appui d’un système de religion quelconque. Répondez à nos arguments, c'est tout ce que vous avez à faire. En ayant recours à la violence, vous faites voir que vous n’avez rien à répondre. Si vous veniez à bout de me détruire, comme vous avez détruit ma maison, ma bibliothèque et mes instruments de physique, il s’élèverait aussitôt dix personnes de plus, d’un génie et de lalents supérieurs aux miens. Si vous assassiniez ces dix, il en paraitrait cent; et croyez-moi, la conduite que vous tenez a porté un coup plus violent à l’église anglicane que tout ce que mes amis et moi avons jamais pu faire.

« D'ailleurs, il n'appartient qu'à des lâches et à des hommes féroces d'écraser ceux qui ne peuvent faire aucune résistance. Dans cette étrange affaire, nous sommes les brebis et vous êtes les loups. Nous conserverons notre caractère, puissiez-vous changer le vôtre! À tout événement, nous vous rendons bénédictions pour malédictions, et puissiez-vous reprendre bientôt cet amour du travail et cette sagesse de mœurs qui distinguaient jadis les habitants de Birmingham !

« J, PRIESTLEY. »