Danton émigré : recherches sur la diplomatie de la République an 1er-1793

LA POLITIQUE DE DANTON. 85

Dans le tome III de ses Hémotres (livre VII), Damouriez raconte tout au long les péripéties de cette négociation, du moins en ce qui le concerne; mais il semble ignorer absolument sous quelle influence elle s'était nouée. Il l’attribue naturellement à son seul mérite, au prestige de sa personne, sans dire un seul mot de Danton, ni de ses alliés dans le Parlement anglais. Ignorait-il qu’ils y aient eu la main ? cela ne nous parait guère probable (V. pièce n° 22).

M. Louis Blanc aussi, que l'on sait être implacable pour l’homme d'Etat de 93, attribue, dans le tome VIII de son /Zistoire de la Révolution française, à une ruse de Pitt, les négociations que le conventionnel poursuivait à Londres, en dehors du plénipotentiaire de la République :

« C’est ainsi que, dit-il, dans le temps même où il armait toute l'Angleterre et irritait l’orgueil de la France (il s’agit de Pitt), son apparente condescendance favorisait le développement d’une intrigue dont la conservation de la paix était le but, Talleyrand le machinateur, et Dumouriez le héros. »

Une intrigue! Y a-t-il donc autre chose en diplomatie? et, néanmoins, en face des aveuglements et des brutalités de la guerre, peut-on imaginer rien de plus honorable, de plus efficace et d'aussi tutélaire que l’action diplomatique ?

Or, dans le long détail qu’il fait de cette négociation, M. Louis Blanc ne prononce pas le nom de Danton.

Jgnorait-il aussi, comme à peu près tous les historiens, les relations que ce dernier avait avec Talleyrand, et, par son intermédiaire, avec le parti whig, quoique celles-ci soient très explicitement établies par le Moniteur et les autres papiers publics du temps ? Certainement, il les ignorait, car autrement il en eût tiré parti contre le conventionnel, pour lui imputer à crime l'intrique qu'il condamnait avec tant de mépris.

Cependant, que l’on imagine une armée anglaise débarquant à Calais ou tout autre point de la côte, et descendant par la Somme, vers Paris, à la fin d’août 1792,