Fantaisie savoisienne : le général de Boigne

IL

Le procès en diffamation intenté par les descendants du général de Boigne au Patriote savoisien, occupa l'audience pendant deux jours, et le jugement ne fut rendu que huit jours après.

Le soir du second jour, je rencontrai Vallier.

— Vous ne savez pas, me dit-il, toules ces histoires du général de Boigne sont d’affreuses blagues, et rien de plus.

— Pas possible ! m’écriai-je ébahi comme un homme tombant de la lune.

— Les preuves sont là, péremptoires, convaincantes. De Boigne n’a pas plus vendu Tippo-Saïb que je ne vends de l’opium aux Chinois.

— Quelles preuves ?.. hasardai-je.

— Une entre mille, et je la crois suffisante : Tippo-Saib a été vaincu (la question de trahison réservée) en 1799, et de Boïigne était de retour en Europe depuis 1797. Pièces à l'appui.

-— Mais s’il n’a pas vendu Tippo-Saib, c’est d’un autre roi qu’il a trafiqué.…

— Pas davantage. Le roi qu’il servait était l’allié des Anglais; ils faisaient des affaires ensemble. L’Angleterre n’avait donc pas de roi à acheter par là...

— Je tombe des nues. Car enfin.— Et je recommençai l’exposé des arguments à la faveur desquels ces fameuses histoires s'étaient accréditées.