Gentilshommes démocrates : le vicomte de Noailles, les deux La Rochefoucauld, Clermont-Tonnerre, le comte de Castellane, le comte de Virieu

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sont eux ; ils setrompent, mais ils ne trompentjamais. — Ce sont des caractères.

Mort, le duc de Liancourt fut revendiqué par la démoeratie. Les ducs et pairs ne portèrent pas son cercueil ; les anciens élèves de l’école des arts et métiers de Châlons, c’est-à-dire le peuple éduqué, rehaussé, relevé artistiquement etindustriellement parun des premiers seigueurs du royaume, briguérent cet honneur. Ces manifestations populaires sous un gouvernement qui ne reconnaissait pas la souveraineté populaire donnèrent lieu à un affreux scandale. Les élèves de Chälons ayant élevé la bière sur leurs épaules pour la conduire à l’église, un commissaire de police avec ses agents se précipita sur eux sous prétexte qu'ils n'étaient point patentés… Il y eut bagarre, lutte : «Le cercueil fut jeté dans la fange, il fut brisé. » La démocratie n’avait pas le droit de prouver son existence ! « Jamais il n’y eut un acte plus illégal, plus révoltant, plus impie (1)! » La Restauration bravait l'opinion; trois ans plus tard, elle était renversée (2)!

(1) Vie du duc de la Rochefoucauld-Liäncourt, par son fils Gaëtan, p. 90.

(2) Charles X, pour atténuer l’amertume de ‘ce sacrilège, manda auprès de luile second fils du duc de Liancourt, lequel s'était fait remarquer par des idées diamétralement opposées à celles de son père. — « Demandez-moi une faveur, lui dit le roi, je vous la donnerai. » — « Sire, je suis maréchal de camp, faites-moi lieutenant général, » Le roi ouvre un annuaire militaire qui était sur sa table : « Mais, dit-il, vous n’ètes maréchal de camp que depuis 1816. » — « Mais, Sire, où serait, sans cela, la faveur? » — « Vous n'avez donc pas servi sous Bonaparte ? » — « Moi, Sire, quelle injure! » — « Vous auriez mieux fait, vous seriez plus ancien!» Sur ce dernier mot, le