Gentilshommes démocrates : le vicomte de Noailles, les deux La Rochefoucauld, Clermont-Tonnerre, le comte de Castellane, le comte de Virieu

CLERMONT-TONNERRE 137

L'œuvre à réaliser n'était pas l’œuvre définitive: c'était l'œuvre préparatoire. Il s'agissait simplement de dégager des cahiers électoraux les vœux incontestés de la nation et de les faire proclamer lois par l'Assemblée nationale. A d’autres incomberait la tâche de l'équilibre et de la coordonnation. Et il arriva alors aux premiers constituants français ce qui arrive à tous les fabricants de théories : ils se passionnèrent pour des principes absolument vrais en soi, mais qui jetés dans les atmosphères populaires aux prises avec les inconséquences et les passions de la foule portèrent des résultats en raison inverse des vérités qu’ils proclamaient. Nous allons voir Mounier et Clermont-Tonnerre, qui furent l’âme de ce comité, s’efforcer avecla même bonne foi de maintenir en présence deux souverainetés, celle du roi et celle du peuple, convaincus que la souveraineté peut se dédoubler, et que la vie de l’une n’est pas la mort de l’autre. Et le bon sens, ou plutôt la logique inclineront impitoyablement l’Assemblée et les inclinera eux-mêmes vers des institutions en contradiction absolue avec leur utopie, institutions qui réaliseront le dépouillement de l'une de ces souverainetés au profit de l’autre.

Nommé le 7 juillet, dès le 9 le comité (1) soumettait aux États généraux un plan de travail. Par Ja promptitude de sa résolution, on peut juger que la

(2) Rapport fait par Mounier au nom du comité chargé de préparer le travail de la constitution (9 juillet 1789). Voir la

Gazelle nationale. 8.