Gentilshommes démocrates : le vicomte de Noailles, les deux La Rochefoucauld, Clermont-Tonnerre, le comte de Castellane, le comte de Virieu

CLERMONT-TONNERRE 151

des trois systèmes viennent des points les plus opposés. Mounier, Lally-Tollendal, Maury, Barnave font assaut d’éloquence. Toutes les objections sont mises en lumière; toutes elles ont les apparences de la vérité. « Personne n’a le droit d'empêcher une nation de faire des lois. Que ferait le roi s’il pouvait rendre nul à son gré le pouvoir législatif({) ? » En revanche, il est vrai que « lui refuser le veto absolu, c’est lui enlever la qualité de colégislateur (2) ». Les constituants sont dans un embarras cruel. On ne fait pas un seul objet de deux choses contraires, et, je le répète, souveraineté du roi et souveraineté du peuple sont les deux pôles opposés de l’économie gouvernementale !

C’est ici que l'inanité de leur prétendue royauté démocratique apparaît en pleine lumière. S'il y a veto définitif, il y aura autocratie et non démocratie. S’il n’y a pas de veto, il y aura démocratie, mais il n’y aura plus monarchie. Mounier et Clermont-Tonnerre en sont réduits à s’excuser de rester fidèles à la monarchie, « à ce gouvernement qu'il faut appeler, quoi qu'on en puisse dire, le gouvernement monarchique (3)! » On en disait donc de bien terribles choses! Et pour lui garder le souffle de vie qu’ils étaient en train de lui arracher, ils ajoutent : « Sans doute, il est inutile de prouver que le pouvoir exécutif dans un vaste royaume doit jouir d'une grande puissance. Chez un peuple jaloux de sa liberté, cette puissance

(L) Séance du jeudi 3 sept. 1789. M. de Crénières. (2) Séance du jeudi 3 septembre 1789. L'abbé Maury. (3) Séance du 4 septembre 1789. Mounier.