Histoire de la liberté de conscience : depuis l'édit de Nantes jusqu'à juillet 1870

94 LA LIBERTÉ DE CONSCIENCE EN FRANCE

celle des biens fonciers du clergé, qui étaient immenses et de leur attachement à leurs prérogatives et à la royauté. On avait nommé, le 20 août 1789, un Comité dit ecclésiastique, chargé d'examiner toutes les questions qui la concernaient. La composition de ce comité était assez hétéroclite: des évêques comme l’évêque de Clermont et celui de Luçon, y coudoyaient des curés jansénistes tels que Martineau et Thiébaut; un dernier élément était formé de catholiques gallicans : Durand de Maillanne, Lanjuinais, Treilhard. Ces deux derniers groupes réunis faisaient la majorité. Préoccupés de vaincre l'opposition du haut clergé, qui soutenu par le Saint-Siège était hostile aux réformes politiques, ils se figurèrent qu'ils pourraient réorganiser l’Église sans consulter le Pape. Mais, comme on l’a dit très justement «en matière de religion, on ne détruit que ce qu'on remplace ».

Ou bien on devait conserver tel quel le système des doctrines et de la discipline catholique, et se concerter avec le Pape, chef légitime de cette Église, pour corriger ses plus criants abus, comme l'avaient fait Charles II d'Espagne et l'empereur Joseph IT, dans ses États héréditaires. Ou bien il fallait avoir la hardiesse de substituer au catholicisme une religion nouvelle dans ses dogmes, dans ses rites, quelque chose comme le protestantisme anglican, avec des prêtres mariés et une liturgie en langue française. Or, on ne fit ni l’un ni l’autre, on rédigea un projet de constitution civile, . qui défendait à tout catholique français de reconnaître l’autorité d'un métropolitain étranger (art. 5)et substituait élection populaire aux formes canoniques en usage, pour la nomination des curés et des évêques (titre IL).

Aussi, quelle que fût la valeur sociale de cette réforme organique, elle était viciée dans son principe, parce qu'elle tendait à soustraire l’Église catholique à l’obédience de Rome et qu'elle violait par conséquent la liberté de conscience des catholiques‘. En vain l'archevêque d’Aix protesta-t-il au nom

1, Aussi, à la séance fixée pour la prestation du serment à la Consti-