Histoire de la liberté de conscience : depuis l'édit de Nantes jusqu'à juillet 1870

10/4 LA LIBERTÉ DE CONSCIENCE EN FRANCE

cessé leurs fonctions sans abdiquer, sur le même taux qu'aux prêtres abdicataires.

On rentrait par là dans la voie de la justice qui mène à la liberté ; mais c’est à de telles époques troublées qu’on s'aperçoit que ce sont les mœurs plutôt que les lois qui font la bonne politique. Entre la République et l'Église catholique soumise au pape, la guerre avait été si acharnée, si sanglante qu'aucun des deux adversaires ne se risquait à désarmer. Le Pape n'avait Jamais reconnu la République qu'il traitait de pouvoir usurpateur et spoliateur et réciproquement les chefs de la Révolution continuaient à traiter en ennemi ou suspect le clergé catholique, qui avait refusé le « serment civique ». IT y avait encore un grand nombre d'églises fermées et bien des prêtres étaient toujours dans des prisons ou sur les pontons de Rochefort ou de Cherbourg, où ils attendaient des navires pour les déporter à la Guyane.

L’évêque Grégoire, qui se montra jusqu’à la fin le courageux champion de la conscience, prit deux fois la parole les rx et 21 décembre 1794 (21 frimaire et 11 nivôse an IT). La première fois, il réclama qu’on étendit l’amnistie au clergé et qu'on relachât tous les prêtres incarcérés pour cause de leurs opinions politiques. « Si, pour mettre un homme en liberté, « disait-il, on demandait s’il est procureur, avocat où méde« cin, cette question indignerait. Pourquoi demander s’il est « prêtre)... Quel que soit un individu, s’il est mauvais « citoyen, punissez-le ; s’il est bon citoyen, protégez-le. Tant « que l’on suivra des principes contraires, on n’aura que le « régime des tyrans! » Il réussit à faire élargir un bon

nombre de prêtres insermentés. Mais quand, dix jours après, (séance du 1° nivôse an ID) il vint proposer à la Convention de faire une loi qui garantit à tous les citoyens l'exercice de leur culte, sous réserve des mesures nécessaires pour assurer l'ordre publie, il échoua devant les préventions opiniâtres de la majorité contre le clergé insermenté. Voici en quels termes il demanda qu'on fit cesser la persécution des réfractaires comme élant une violation de la liberté des cultes, proclamée