Histoire de la liberté de conscience : depuis l'édit de Nantes jusqu'à juillet 1870
120 LA LIBERTÉ DE CONSCIENCE EN FRANCE
reconnaître l'existence légale des deux principales branches, la Confession d’Augsbourg et la Confession réformée où helvétique, 1 voulut assurer le recrutement de leurs ministres, en subventionnant leurs trois Académies, celle de Montauban (1808), celle de Strasbourg (1802) et celle de Genève (1802). Il voulut aussi les doter d’une organisation propre à chacune; mais, pendant la préparation des « Articles organiques » il songea d’abord à les laisser en dehors de la loi organique des cultes.
C'est alors, en effet (21 ventôse an X, 12 mars 1802), que Portalis présenta au Premier Consul un rapport sur les cultes protestants et un projet de loi, tendant à ce que l’on garantit aux protestants tout ce qui avait été octroyé aux catholiques par le Concordat, à l'exception de la subvention pécuniaire. Ainsi, en mars 1802, la situation, que l’un des premiers jurisconsultes du Conseil d’État proposait de donner au protestantisme, était bien différente de celle que le Concordat et les Articles organiques avaient faite au catholicisme. — Ce dernier, en échange de la subvention qu’il recevait de l’État, était soumis à un contrôle étroit du pouvoir civil, pour ses rapports avec le Saint-Siège et dans son: entière dépendance, pour la nomination des évêques et des curés de canton. Le culte protestant au contraire, ne recevant aucun salaire pour ses ministres, aurait joui de sa pleine liberté de gouvernement. C'était le régime de l’église libre, dans la limite de lobéissance aux lois, tel que les Églises protestantes l'avaient eu sous la Constituante et la Législative (1789-92) et sous le Directoire (1795-1799).
Mais ce projet d'organisation se heurta à deux obstacles : l'esprit dominateur de Bonaparte et l'opinion de la majorité des notables protestants de Paris, que le Premier Consul avait voulu consulter. Bonaparte comprit que le « salaire » était un moyen d'action des plus efficaces sur le clergé de ces confessions non-catholiques ; et les notables, de leur tandis
côté, pensèrent que l’absence de salaire des ministres que les curés en recevaient un — constituait une infériorité