Histoire de la liberté de conscience : depuis l'édit de Nantes jusqu'à juillet 1870
192 LA LIBERTÉ DE CONSCIENCE EN FRANCE
Le célèbre écrivain qui, depuis son procès de 1826, désespérait de la monarchie comme instrument docile de l'Église romaine, se tournait maintenant du côté du peuple et déclarait qu'une nation a le droit de refuser l'obéissance à un pouvoir, qui s’est mis lui-même en état de révolte contre la loi de Dieu. Puis, s'adressant à l'Église, il lui persuadait de ne pas rester unie à une autorité réactionnaire, car elle avait bien plus à espérer du régime de la liberté. « Nous demandons pour « l'Église catholique, disait-il, la liberté promise par la Charte « à toutes les religions, la liberté dont jouissent les protes« tants, les juifs, dont jouiraient les sectateurs de Mahomet « et de Boudha, s’il en existait en France... Nous deman« dons la liberté de conscience, la liberté de la presse, la « liberté de l'éducation... »
Ainsi, par une évolution qui, au fond, avait des motifs politiques, le plus fougueux champion de l’ultramontanisme et de l'alliance du trône et de l'autel en était venu à réclamer la séparation de l'Église et de l'État et à bénir le principe de la liberté des cultes, que naguère il maudissait, Mais le Saint-Siège et la majorité des évêques, aveuglés par leurs pré Jugés, restèrent inféodés à la monarchie des Bourbons et provoquèrent une agitation contre le ministère Martignac qu'ils réussirent à renverser au bout de dix-neuf mois.
À l'avènement du ministère Polignac, le parti clérical crut avoir cause gagnée, car il avait pour lui un Roi selon son cœur et un premier ministre qui avait été préfet de la Congrégation. Il ne dissimula pas ses desseins et fit attaquer par ses journaux « l’Apostolique » et le « Drapeau blanc », ces « codes infâmes vomis par l'eñfer sur la France » (il s'agissait du Code civil, des Articles organiques, des ordonnances Martignac) et l’Université, « cette pépinière d’incrédules ». On ne respecta même pas la Charte, « ce monument d’impiété et d’athéisme ». |
Le nouveau pape, Pie VIII, de son côté, faisait chorus avec ces anathèmes. Dans sa première encyclique, il falmina contre la tolérance, taxée d’indifférentisme ; contre la liberté des cultes