Histoire de la liberté de conscience : depuis l'édit de Nantes jusqu'à juillet 1870

SOUS LA MONARCHIE DE JUILLET 201

excuse le sentiment tolérant des Parisiens, même catholiques, qui étaient en masse favorables à Grégoire. Il est permis, parfois, de faire fléchir la loi devant le devoir suprême de la charité et du respect de la conscience !

Le même conflit se produisit, sept ans après, à propos des obsèques du comte de Montlosier(1838). On se souvient du rôle agressif qu'il avait joué sous la Restauration contre les Jésuites et, depuis la révolution de Juillet, à la chambre des pairs, il s'était montré l’adversaire intraitable de l’ingérence du clergé dans la politique; mais il était resté d’ailleurs catholique convaincu el pratiquant. Il vivait retiré à Clermont-Ferrand. Lorsqu'il se sentit mourir, il demanda un prêtre pour se confesser. L’évêque de Clermont donna l’ordre à tous les curés de la ville de ne lui accorder l’absolution que s’il faisait une rétractation écrite et par devant témoin de ses brochures anti-cléricales. — Sa famille, ayant avisé une paroisse dont le curé était absent, obtint du vicaire que celui-ci vint confesser le mourant et lui donner l’absolution. L’évêque, informé, censura le vicaire et annula l’absolution. — Montlosier alors offrit de déclarer verbalement « qu'il n'avait jamais rien « entendu écrire contre la religion catholique apostolique et « romaine, dans laquelle il désirait mourir. S'il lui était « échappé quelque doctrine opposée à ses dogmes et à sa « morale, il la répudiait formellement ». Mais M£ de Clermont exigea une rétractation écrite et, le vieux libéral ayant persisté jusqu’à son dernier soupir, l’évêque refusa à son corps la sépulture religieuse.

=

A

Cette conduite provoqua une indignation générale. Le gouvernement crut devoir saisir le conseil d'État de cet acte et, sur son avis, le Roi rendit une ordonnance, contresignée par M. Barthe, garde des sceaux (30 décembre 1838), déclarant @ qu'il ÿ avait eu abus de la part de l’évêque de Cler« mont en refusant la sépulture ecclésiastique au comte de

A

€ Montlosier, vu qu'il était mort dans la profession publique « de la religion catholique, qu'il avait demandé et reçu le « sacrement de la pénitence et que le seul motif allégué pour

A