Histoire de la liberté de conscience : depuis l'édit de Nantes jusqu'à juillet 1870

246 LA LIBERTÉ DE CONSCIENCE EN FRANCE

la liberté de conscience trouvait quelques apologistes éloquents : Prévost-Paradol, J.-J. Weiss et Édouard Hervé, dans leurs articles du Courrier du Dimanche’, Eugène Pelletan et Louis Jourdan, dans le Siècle. — Emile Beaussire, professeur à la Faculté de Poitiers, fut celui qui, à ma connaissance, la réclama dans le sens le plus large. Sans s’inquiéter des abus auxquels l'accumulation des biens de main-morte avaient donné lieu chez certains ordres religieux, il défendit l'existence de couvents, en tant qu’« associations d’hommes réunis pour prier et pour mener une vie plus parfaite »°.

Cependant, le décret d'amnistie du 15 août 1859 avait rouvert les portes de la France à une troupe de républicains et de libres penseurs, que le coup d'État de 1851 ou les décrets dictatoriaux sur l’Université avaient mis en fuite. Vers la fin de 1860, quelques-uns d’entre eux organisèrent dans une salle de la rue de la Paix des « conférences » littéraires, qui, quatre ans après, se dédoublèrent en deux groupes. À la salle de la Paix, on allait entendre les Deschanel, Robinet, Eug. Pelletan, Louis Jourdan ; et au Grand-Orient, c'étaient Henri Martin, Taxile Delord, et H. Brisson qui faisaient les Entretiens et lectures.

Ce mode d'enseignement, plus libre et plus souple que l'exposition didactique, se prêtait fort bien à la vulgarisation des idées et servit indirectement au progrès de la cause de la liberté de conscience. * Il prit un grand essor surtout depuis le vote de la loi du 28 mars 1868 sur le droit de réunion. Saint-Mare Girardin s’associa au mouvement, en conférenciant au théâtre du prince impérial. On procédait d’abord

défense de la liberté de penser et Sainte-Beuve saisit l’occasion d’attaques contre la Vie de Jésus de Renan, pour défendre le mème principe (mars 1867), ce qui lui donna un regain de popularité auprès de la jeunesse libérale.

1. V. entre autres l'introduction de Prévost-Paradol à la 2 édition des Vues de Samuel Vincent sur le protestantisme en France (Paris, 1899).

2. La liberté dans l'ordre intellectuel et moral, 1867.

3. V. Emile Descuawer. Les conférences à Paris et en France, Paris, 1890. :