Histoire de la liberté de conscience : depuis l'édit de Nantes jusqu'à juillet 1870

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fausses maximes que Jésus-Christ fut condamné par le Sénat Juif, comme violant la loi de Moïse et séduisant le peuple. En vertu du même principe, les chrétiens furent persécutés par les empereurs romains. Et plus tard, la même règle fut appliquée impitoyablement par la reine Elisabeth aux catholiques anglais, par Louis XIV aux protestants et aux Jansénistes, et par les assemblées révolutionnaires aux prêtres, qui avaient refusé de prêter serment à la constitution civile du clergé.

Le système d'une religion d'État favorisa, s’il ne l’engendra pas, le monopole du clergé catholique et ce fut là une seconde cause d’intolérance. Si l'Église gallicane n'avait été dès l’époque des Carolingiens un des pouvoirs publics, si elle n’eût obtenu des Valois le droit de s’assembler périodiquement pour discuter ses intérêts el voter le « don gratuit » à la Couronne, si elle n'eut reçu enfin des Bourbons restaurés et de Napoléon IIT des privilèges extraordinaires, elle n'aurait pas vu d’un œil si jaloux les progrès du protestanüisme et n'eût pas revendiqué, pour elle seule, le droit de prècher et d'enseigner. Ce sont ces privilèges, qui, par une pente fatale, l’ont conduite à l'intolérance.

L'intérêt pécuniaire est une troisième cause, qui envenima les luttes confessionnelles. On a vu, par l’édit de Traversy et par l’article [TT de l’édit de Nantes (Articles publics), combien le clergé catholique tenait à la restitution des immeubles, qu'il avait perdus dans la guerre et au paiement des dimes mêmes par les Réformés. Les seigneurs et le clergé protestants, de leur côté, n'étaient pas moins âpres à revendiquer le temporel, comme on le vit dans l'affaire des biens ecclésiastiques du Béarn. Les deux partis, qui se disputaient l'âme de la France, oublièrent trop souvent la grande parole du divin Maitre, dont tous deux pourtant se réclamaient : Vous re pouvez adorer Dieu et Mammon !

Les marchands et les corporations ouvrières au xvu° siècle et au xvim® siècle, beaucoup de collatéraux catholiques dénoncérent les juifs ou les industriels et riches protestants aux