Histoire de la liberté de conscience : depuis l'édit de Nantes jusqu'à juillet 1870
DEPUIS LA MORT DE MAZARIN JUSQU A L'ÉDIT DE TOLÉRANCE 77
illicites », de « concubinages scandaleux ». L'assemblée de 1758 exprima le vœu « que l'exercice publie de leur religion fût absolument interdit. » — Par contre, l'Assemblée de 1762 supplia le Roi, contrairement aux arrêts de trois Parlements, de maintenir l’ordre des Jésuites et protesta contre « la « gène apportée à l'exercice du ministère des curés ultra« montains par les Parlements jansénistes. »
On sait comment le gouvernement, par l'organe du comte de Choiseul, répondit à ces doléances : il ferma les collèges et les maisons-professes des Jésuites et finit par les bannir du royaume. Cette abolition fit plus pour la cause de la liberté de conscience que les plus spirituelles brochures de Voltaire ou les arguments les plus solides de Rousseau.
Désormais, les assemblées du clergé, privées de leurs plus forts alliés, ne purent empêcher la liberté des cultes dissidents de faire de rapides progrès. Le « Mémoire sur les entreprises des religionnaires », rédigé par l'archevêque de Toulouse et présenté au roi, au nom de l’assemblée de 1765, est un réquisiloire en forme contre la tolérance : « Sire, y disait l’arche« vêque, il n'y a dans votre royaume qu’un seul maitre, le « monarque à qui nous obéissons ; il n'y a aussi qu'un seul « culte, une seule religion ! » Après quoi il dénonçait la tolérance envers les non-catholiques, comme un principe de révolte et d’anarchie. Le même prélat renouvela, dix ans après, sa protestation contre la liberté de conscience au nom de l’Assemblée du clergé de 1775 CA septembre).
Mais les ministres de Louis XVI firent la sourde oreille à ces doléances du clergé gallican ; l'opinion publique se prononçait de plus en plus fort en faveur de la tolérance et gagnait même les rangs du clergé le plus éclairé. On en trouve l'expression touchante dans trois brochures attribuées à deux ecclésiastiques.
L'abbé Yvon qui écrivit sous le voile de l’'anonyme la Liberté de conscience resserrée dans ses bornes légitimes (Londres, 1754) apparlient à la même école que Turgot ; il admet la tolérance civile de plusieurs religions différentes.