Histoire de la liberté de conscience : depuis l'édit de Nantes jusqu'à juillet 1870
DE L'ÉDIT DE TOLÉRANCE JUSQU A LA CHUTE DE NAPOLÉON 89
de la Législative au Directoire, c’est la théorie de Rousseau (dans son « Contrat social »)qui prévalut; les Jacobins d’abord, puis certains membres du Directoire essayèrent de reconstituer une religion d'Etat et persécutèrent les prêtres catholiques non assermentés. Cependant, les principes de la vraie liberté trouvèrent des défenseurs convaincus et éloquents dans l’abbé Grégoire et Boissy d’Anglas, dans Camille Jordan et Pastoret. Grâce à leurs efforts, la liberté de conscience, longtemps étouflée, jeta quelque éclat et parut devoir triompher, mais la politique d’intolérance l’emporta finalement au 18 fructidor.
Bonaparte arrive, sous l’apparence d’un libérateur, mais au fond il est surtout préoccupé de se servir de l'Église comme d’un instrument de gouvernement. Le Concordat de 18017 procure à la religion catholique la loi du 18 germinal an X, assure aux protestants la protection et le salaire de l’État ; mais les « Articles organiques » les mettent dans la servitude humiliante du souverain qui dispute au pape le gouvernement de l’Église catholique et finit par le persécuter. Ce n’est pas la liberté réelle, mais le régime d’une tolérance arbitraire et conditionnelle. C’est la troisième phase traversée alors par la liberté de conscience (1799-1814). Nous arrivons à Louis X VIII qui, dans sa charte de 1814, rétablit les vrais principes de Henri IV.
$ 1. — Louis XVI, reprenant la tradition de Henri IV, rendit aux Rélormés une situation légale et la liberté du culte privé, en France. Les Israélites, de leur côté, obtinrent le bénéfice des ordonnances favorables de Louis XIIT et de Louis XIV et jouirent d’une assez grande tolérance. Or, il restait encore beaucoup à faire pour émanciper les uns et les autres du joug que les préjugés, datant du moyen âge, faisaient peser sur eux ; C'était la tâche qui incombait aux hommes de la Révolution française et à Bonaparte, qui en fut pour ainsi dire l’exécuteur testamentaire.
À quelques exceptions près, les révolutionnaires étaient si imbus de la notion d’une vieille religion d’État ou si pleins de rancune contre les chefs de l'Église catholique romaine qu'ils