Histoire de la Révolution, 1747-1793 [i.e. 1774-1793]. République

D56 HISTOIRE

servait aussi à atténuer les ravages des colonnes mobiles , lancées contre les conserits réfractaires : d’après l'institution inique de ces garnisaires armés , le frère répondait de son frère absent, il était enlevé et forcé de marcher pour le remplacer : les amis, et même les voisins, étaient compris dans cette cruelle solidarité. On arrêtait des familles entières, qu’on garrottait pour leur arracher dans les cachots des délations qui eussent outragé la nature. On vit les prisons de Montbrison, en 4813, encombrées de malheureux qu’on y retepait dans ce but.

Tout servait de moyen aux extorsions des plantons garnisaires. Après avoir épuisé les ressources pécuniaires des villageois, ils saisissaient leurs meubles, qu'ils uransportaient sur la place du lieu; et si personne ne s’en rendait adjudicataire, ils y mettaient le feu.

Par un raffinement de cruauté, ils semparaient aussi des bestiaux , richesse et compagnons du laboureur; ils les enfermaient et les laissaient sans nourriture, dans l'espoir que par leurs vagissemens, ils obtiendraient des aveux des infortunés qu'ils dépouillaient.

On aura peine à croire un jour que dans le siècle de la civilisation tant d'actes de barbarie aient été consommés. Les autorités locales, pour obtenir la faveur de Napoléon, enchérissaient encore sur ces actes : un préfet ayant condamné un de ses administrés, habitant un village auprès de Thiers, à rapporter dans un bref délai les certificats de six cents maires, pour constater labsence de l’un de ses fils, ce malheureux père , afin de sauver d’une ruine totale ses autres enfans, entreprit à pied ce pénible pélerinage. Cet infortuné avait déjà parcouru quatre cents communes, lorsqu'il arriva à Chevrières exténué de fatigue et baletant de souffrance : le roi de cette peuplade hospitalière Vaccueillit comme un frère, et tous les cœurs compatirent à ses douleurs. Au signalement qu’il donna de son fils, le roi de Chevrières fit appeler un des proscrits qu'il avait secou-