Journal d'un étudiant (Edmond Géraud), pendant la Révolution (1789-1793)

PENDANT LA RÉVOLUTION. 951

« Dans la même séance le Roi a envoyé une lettre au président par laquelle il annonce à l’Assemblée le renvoi de M. de Narbonne; il ajoute que M. Bertrand mérite toute sa confiance et qu'il la lui a entièrement donnée. On dit au château que le Roi a remercié Narbonne avec les témoignages de l'humeur la plus violente. Celui-ci est parti pour les frontières, où il servira sous M. de Lafayette en qualité de maréchal de camp. Chacun est indigné ici de la démarche du Roi ; la haine se partage entre Bertrand et lui. Le patriotisme et l'enthousiasme sont au plus haut comble dans la capitale; toutes ces nouvelles vont produire le plus grand effet dans les départements et relever toutes les espérances. Les fonds ont singulièrement monté. M. de Grave remplace Narbonne. On donne ce soir Brutus à plusieurs spectacles. Les Jacobins se sont donné rendez-vous au théâtre Richelieu. Je te laisse à penser comme les allusions y seront saisies et combien le patriotisme y prédominera. Je me propose d'y aller aussi. »

Suivant la décision de l’Assemblée, Delessart fut envoyé devant la haute cour d'Orléans, instituée pour juger les crimes de lèse-nation.

Pendant que ces événements se passaient à l'Assemblée et que la siluation politique s'assombrissait de plus en plus, des troubles continuels motivés par la cherté des vivres éclataient dans Paris; mais ils étaient devenus tellement fréquents qu'on n'y attachait plus