Journal d'un étudiant (Edmond Géraud), pendant la Révolution (1789-1793)

268 LE JOURNAL D'UN ÉTUDIANT

étranges, plus incohérentes avec la marche invincible qu'avait prise la Révolution. »

C'était la guerre inévitable. Le Roi se rendit à l'Assemblée et proposa la guerre contre le roi de Bohême et de Hongrie. L'enthousiasme fut indescriptible : « Quoi ! l'étranger a l'audace de prétendre nous donner un gouvernement! s'écrie un député. Votons la guerre. Dussions-nous tous périr, le dernier de nous prononcerait le décret. » « Si votre humanité souffre à décréler en ce moment la mort de plusieurs milliers d'hommes, dit un autre membre de l’Assemblée, songez aussi qu'en même temps vous décrêtez la liberté du monde. »

La guerre fut votée au milieu d’acclamations frénétiques. Aux Tuileries la satisfaction ful grande. La Reine n'avait plus d'espoir que dans l'intervention des étrangers pour la délivrer d'une situation odieuse et intolérable. Elle envoie aussitôt à Vienne un message secret pour désavouer tout ce qu'on l'oblige à dire ainsi que le Roi, et pour supplier qu'on vienne promptement à leur secours.

A Paris l’allégresse est générale. La Bourse est dans une prospérité « miraculeuse », tous les effets haussent, on ne doute pas un instant du succès, on est convaineu que les peuples que nous allons délivrer nous recevront à bras ouverts. Les dons patriotiques affluent à l'Assemblée : « Ce n’est plus le Rhin, comme disait