Journal d'un étudiant (Edmond Géraud), pendant la Révolution (1789-1793)

PENDANT LA RÉVOLUTION. 274 En 1790, quarante soldats du régiment suisse de Château vieux avaient été condamnés à trente ans de galères pour sédition militaire ; ils avaient été exceptés de l’amnistie rendue après la promulgation de la Constitution. Le 12 février 17992, l'Assemblée décréta leur mise en liberté. Leur retour fut un triomphe. La ville de Brest leur offrit un banquet, et, le 15 avril, la ville de Paris donna au Champ de Mars une grande fête en leur honneur. La contre-révolution fit, paraît-il, tous ses efforts pour empêcher ces réjouissances d'avoir lieu; elle répandait les bruits les plus effrayants : on annonçait que les troupes se tiendraient prêtes, qu'on forcerait Pétion à mettre le drapeau rouge et qu'on balayerait avec la mitraille tout ce peuple qui réclamait des fêtes.

€ Paris, l'an IVe de la liberté, du 15 avril, le dimanche matin.

« C’est aujourd'hui, dit Edmond, le jour de la fête civique célébrée par le peuple à l'occasion des Suisses de Châteauvieux. La rage de nos aristocrates, qui ont tout employé, tout mis en usage pour l'empêcher, est maintenant à son plus haut comble ; ils voient avec horreur et même avec effroi ce jour où le peuple, rassemblé dans une seule enceinte, pourra prendre le sentiment de sa force, de ses droits, de sa dignité. Jusqu'ici, leur impuissante fureur s’est répandue en sophismes et en maximes paradoxales; ces moyens